Les neutralisants font partie de la composition de la majorité des milieux de culture destinés aux prélèvements environnementaux dans le domaine pharmaceutique. Sur le vieux continent, le milieu dominant est le TSA (Tryptic Soy Agar) additionné des molécules (=neutralisants) suivantes (TSA+LTHT) :
◉ Lécithine
◉ Tween 80 (Polysorbate 80)
◉ Histidine
◉ Thiosulfate
Cette formulation est donnée par la pharmacopée européenne (PE) et américaine (USP). Or, pour les milieux de culture gamma-irradiés, ces textes n’indiquent ni la nature ni la concentration exacte. Dès lors, les performances de ce système de neutralisant sont extrêmement dépendantes de l’expertise du fabricant du milieu prêt-à-l’emploi.
Les deux textes précédemment cités (PE 2.6.12[1] et USP <61>) recommandent l’utilisation de certaines molécules. Le tableau ci-après donne les molécules actives des désinfectants les plus fréquemment utilisés et le potentiel d’inactivation des neutralisants :
Le tableau 2.6.12-2 de la Pharmacopée Européenne n’indique pas les concentrations de neutralisants qui doivent être utilisés dans les milieux de culture. Néanmoins, l’obligation des fabricants de milieux de culture d’indiquer les potentielles inhibitions de leur molécule désinfectante, permet d’obtenir des informations précieuses pour les concentrations utiles. Il s’agit toutefois d’informations difficilement exploitables. Ceci en raison des ordres de grandeur qui ne sont pas ceux de la composition classique des milieux de culture.
Un autre point important, le thiosulfate et l’histidine sont des molécules chimiques « standardisables ». L’origine biologique de la lécithine et du tween 80 ne permet pas d’obtenir le même degré de standardisation. Dès lors, leur qualité peut avoir un impact significatif sur les performances d’inactivation des désinfectants. C’est pourquoi le process de validation des couples neutralisants/désinfectants est crucial pour l’industrie pharmaceutique.
Pour garantir les performances de leurs produits et éviter les phénomènes d’acclimatation ou de résistance, les fabricants de désinfectants innovent. Ceci engendre des formulations nouvelles de désinfectants alors que les systèmes conservateurs eux sont figés ! De ce fait, l’innovation apporte des désinfectants inédits pour lesquels le système de neutralisants majoritaire n’est plus efficace.
Les désinfectants contenant des ammoniums quaternaires (QAC), composés actifs contre les bactéries GRAM positives, sont un parfait exemple des limites du système LTHT. En effet, ces molécules peuvent échapper à l’action des neutralisants. Cela remet donc en cause l’utilisation de la formule LTHT bien qu’elle soit indiquée dans la PE. Le système LTHT peut être modifié, dans ce cas le nouveau système neutralisant doit répondre à deux exigences, selon le chapitre 2.6.12 de la PE : « Des agents neutralisants peuvent être utilisés pour neutraliser l’activité de substances antimicrobiennes interférentes (tableau 2.6.12-2). Ils peuvent être ajoutés au diluant choisi ou au milieu, de préférence avant la stérilisation. L’efficacité de tout neutralisant utilisé et son absence de toxicité à l’égard des microorganismes doivent être démontrées au moyen d’un blanc comportant le neutralisant mais non le produit »[1]
Ce paragraphe permet aux utilisateurs des milieux de culture d’utiliser un système de neutralisant pertinent ; ceci en restant conforme à la règlementation, à partir du moment où l’absence de toxicité des neutralisants et son efficacité sont démontrées.
Le tableau ci-dessous analyse le nouveau système de neutralisant U+ développé par PMM. Il apparaît que les performances de ce dernier, par rapport au LTHT vis-à-vis des QAC, sont nettement meilleures. Pour mettre en évidence les performances du système U+, un étalement d’une concentration définie (20 ml/m²) de désinfectant, suivi (après 15min) de l’inoculation d’une suspension calibrée d’une souche, ont été réalisés. Par la suite, chaque gélose a été incubée 18-24 heures (ou 3-5 jours pour les souches de levures et moisissures). Les données montrent le résultat du recouvrement (=dénombrement par rapport à une boite inoculée avec la même suspension, les mêmes conditions d’incubation mais sans désinfectant).
Le système U+ consiste en une modification du système LTHT. Le thiosulfate a été remplacé par le neutralisant U+. Ce dernier montre lors des tests de bien meilleures performances d’inactivation des QAC ou des biguanides. Cela se traduit par une levée de l’inhibition sur les microorganismes et une absence de toxicité qui sont les deux critères demandés par les textes règlementaires.
Il apparaît alors que le système U+ a un spectre d’action/d’efficacité sur les désinfectants plus large que le système LTHT. Cela représente un avantage pour un industriel s’il utilise déjà des désinfectants avec des QAC. Dans ce cas, le système LTHT représente un risque avéré de résultats faux négatifs. Dans le cas où les désinfectants ne comportent pas de QAC, alors le système U+ représente une sécurité/flexibilité pour les prochains désinfectants qui seront utilisés.
Tous les systèmes de neutralisants doivent être systématiquement validés (vis-à-vis des désinfectants) avant leur utilisation en routine. Cette validation doit être réalisée en utilisant les procédures de nettoyage/désinfection du site industriel. Elle doit inclure les souches de références mentionnées par les textes règlementaires et aussi (surtout !) des souches représentatives de la flore du site industriel.